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Résumés des chapitres // Abstracts of the chapters

1. Introduction

Les premières pages de cette préface font figurer les approbations dont bénéficie Lezeau pour la publication de son travail : André du Saussay, évêque et comte de Toul, puis un conseiller du roi en son conseil d’Etat, un parlementaire ; s’ensuit le privilège du roi.
Lezeau présente son œuvre. Il écrit que son devoir est de ne pas laisser tomber dans l’oubli la mémoire de Michel de Marillac. Pour reconstituer cette vie, il a mis à profit sa propre familiarité avec le chancelier, ainsi que plusieurs témoignages directs. Lezeau ne prétend pas parler d’affaires d’Etat, mais rapporter les capacités de Marillac, ses vertus, sa dévotion, la sainteté de sa vie, et son peu d’intérêt pour les vanités mondaines. Lezeau loue le suprême degré de dévotion et de courage dont fit preuve Marillac en servant Dieu tout en restant dans le siècle. Il évoque aussi la composition de son ouvrage, à la fois thématique et chronologique.

2. De sa Genealogie // Of his genealogy

Ce chapitre inaugural est indispensable dans l’ordonnancement des Mémoires de Michel de Marillac. En effet, la constitution d’une généalogie nobiliaire, et par là même le rattachement d’un individu à un groupe lignager, est un passage obligé de la littérature du for privé du XVIIe siècle. Quelles sont les raisons qui poussèrent les Marillac, de grands robins, à faire rédiger leur généalogie ? Si la réponse englobe de multiples possibles, une première nécessité correspond à la volonté de s’incorporer dans une nouvelle définition de la noblesse à l’heure de l’absolutisme monarchique. Il s’agissait pour les Marillac d’approfondir la généalogie familiale de quelques générations de seigneurs médiévaux auvergnats afin de leur apporter une profondeur temporelle un peu plus conséquente. En offrant un siècle supplémentaire à leur noblesse, les Marillac effaçaient une intégration trop récente dans le second ordre et ils en faisaient oublier la nature : d’un anoblissement par charges et par lettres royales, ils prétendaient désormais tenir leur distinction sociale du fief. L’anoblissement visible de la robe cédait le pas face à l’idéal de la vie seigneuriale, qui demeurait encore le principal précepte du vivre noblement. Ici, point de revendication d’origine mythique ou mythologique, à l’heure de l’État louis-quatorzien, il était désormais fantaisiste de se projeter dans un passé aussi lointain que merveilleux. Le cas des Marillac correspond pleinement à ce changement des mentalités.
A-V S

3. De ses offices et commissions // Of his offices and commissions

Le chapitre consacré aux offices est tout d'abord l'occasion de revenir sur les débuts de la carrière de Michel de Marillac, sur ses études et ses premières armes. L'auteur le montre sachant saisir l'occasion pour obtenir des offices et commissions où il se montre digne de la plus grande confiance, ainsi que sa popularité auprès des foules (prouvée, dit Lézeau, à l'occasion de sa commission pour aller tenir les états provinciaux dans le sud-ouest du royaume). Son parcours est déjà jalonné d'éléments montrant que l'homme reçoit des grâces particulières : Marillac échappe aux accidents sur les mauvaises routes grâce à la Providence.
Après plusieurs commissions dans des provinces y compris les plus éloignées, Marillac fait la preuve de sa capacité de travail y compris dans les missions les plus délicates, comme celle qui consiste à faire appliquer des traités sur la frontière avec l'Espagne. Plus tard, il traite aussi bien les affaires publiques liées à sa charge, que les affaires de la famille royale (règlement de la succession de Marguerite de Valois, mariage de Louis XIII...)
Lézeau prend soin de ne pas présenter la succession de charges et de missions d'importances comme la preuve de l'ambition de Marillac : au contraire, lorsque se profile pour ce dernier la charge de président au parlement, il se félicite de ne point l'avoir eue. Au bout d'une douzaine d'année d'exercice comme maître des requêtes, cherche déjà à se retirer du monde pour se consacrer aux affaires spirituelles. La scène où il apprend qu'on veut faire de lui un conseiller d'Etat est également l'occasion de le montrer comme un homme qui ne recherche en rien les honneurs, voire les fuit, afin de préserver son honneur et son salut.
Après son accession aux plus hautes charges, comme surintendant des finances et comme garde des sceaux, Marillac est présenté comme homme parfaitement intègre, obligeant sans être corrompu, bénéficiant de l'affection du roi, de la Reine-mère et de Richelieu, mais toujours tiraillé entre la volonté de bien exercer sa charge, et le désir de fuite du monde. L'exercice de la charge est un « purgatoire », occasion de mortification pour mieux assurer son salut dans l'au-delà.
C R-L

4. Comment il a este le premier qui a faict la proposition sur laquelle est Intervenu arrest pour la manutention de la Loy Salique, et de quelques autres faicts concernans ceste matiere // How he was the first to make the proposition by which [the Parlement of Paris] intervened with a decree to apply the Salic Law and other facts concerning this matter.

Ce chapitre est consacré à l’encombrant passé ligueur de Marillac. Lezeau rapporte l’action de son maître alors que celui-ci était conseiller au parlement ligueur de Paris au début des années 1590. Présenté comme un catholique sincère, uniquement motivé par son zèle religieux, Marillac aurait été un des artisans de la paix, à l’inverse des Seize extrémistes. Il aurait d’abord poussé le parlement de Paris à diverses initiatives conciliatrices dès 1591. Lors du moment crucial de 1593, Marillac aurait mobilisé le parlement pour s’opposer au projet des Etats généraux d’une élection royale. Il serait indirectement à l’origine de la promulgation de l’arrêt Lemaître, qui, en proclamant la primauté de la loi salique, aurait mis fin aux ambitions de l’infante d’Espagne sur la couronne de France.

5. De la Saincte conversation qu’il a eu avec La Bienheureuse Sœur marie de l’Incarnation // Of the saintly conversations that he had with the blessed sister Marie de l'Incarnation

En 1602, Marillac, à la lecture d’une Vie de Thérèse d’Avila, aurait été inspiré par Dieu de favoriser l’installation en France de l’Ordre des Carmélites Déchaussées. Il s’en ouvrit à Barbe Acarie (1566-1618), une des figures du milieu dévot parisien. Depuis, ils conversèrent quotidiennement. Cette conversation enseigna à Marillac le chemin de la vertu et de la piété. Marillac et Madame Acarie se mobilisèrent, tant auprès du roi que de l’Eglise, pour favoriser l’arrivée des Carmélites en France. Ils recherchèrent aussi les lieux propres à accueillir les monastères, à Paris, à Amiens et à Pontoise. Leur sainte conversation dura jusqu’en 1614, date à laquelle Madame Acarie entra au carmel d’Amiens sous le nom de Sœur Marie de l’Incarnation. Au moment de se séparer, elle recommanda à Marillac la continuation de sa charité, et il assista à sa prise de voile. Ils continuèrent à s’encourager l’un l’autre à la piété, par une correspondance assidue. Sœur Marie se retira  au carmel de Pontoise en 1616. Lors d’une visite de Marillac, elle eut une vision de la Vierge, à côté de lui. Lorsqu’elle mourut (avril 1618), Marillac, et d’autres sentirent des odeurs suaves, signe de l’élévation de l’âme de la défunte. Depuis, Marillac commença à instruire le procès en canonisation de Barbe Acarie.

6. De la Saincte conversation qu’il a eu avec La Bienheureuse Sœur marie de l’Incarnation // Of the little interest that he had in riches

Le chapitre consacré aux richesses est destiné à montrer un Michel de Marillac qui, tout en appartenant aux hautes franges de la société, ne revendique pas moins un détachement complet vis-à-vis des contingences matérielles. Le personnage vit cependant dans une aisance confortable, ayant hérité de son père et de ses deux frères morts sans enfants, mais aussi grâce à des choix judicieux en matière matrimoniale : ses deux épouses successives lui apportèrent de dots plus que confortables.
Suivant les préceptes de l'Evangile, Marillac décide non seulement de « ne pas s'enrichir » dans l'exercice de ses charges, y compris en refusant les dons venus du roi et de la Reine mère, et les « pots de vin » et autres gratifications qu'il était coutume d'accepter dans sa condition et sa charge. Il apparaît alors comme une figure éminemment moralisatrice au sein de la cour – et de fait, son passage à la surintendance des finances est un temps de moralisation du système des finances royales.
Marillac va même jusqu'à cesser de gérer son patrimoine afin de l'augmenter : il se contente de l'administrer, et déclare remettre l'avenir de ses enfants à la Providence. Ainsi la richesse est vue comme un obstacle à l'accomplissement du salut, mais même la construction familiale est une richesse qu'il faut abandonner pour mieux suivre les commandements divins. La seule utilisation profitable des richesses est le don aux instutitions religieuses (Lézeau en donne un décompte précis), ou de pieuses entreprises comme l'entretien des armées dirigées contre les protestants de La Rochelle.
La charité est très ordonnée chez Marillac, qui développe un argumentaire contre la mendicité (source de vice), et déclare préférer agir de façon ciblée, choisissant les bénéficiaires de ses aumônes avec soin. Les enfants, parents et domestiques de Marillac sont soumis au même régime : ils ne doivent être ni joueurs, ni cupides, et ne point avoir de train de vie dispendieux ni d'ambitions démesurées. Du reste se refuse-t-il à les établir avantageusement dans le monde. De la même manière, au fil des années, Marillac se défait de plusieurs terres, allégeant son patrimoine et soulageant sa conscience afin de vivre dans une « heureuse pauvreté »... qui est toute relative.
C. R-L

7. Du mépris pour la vaine gloire //Of how he spurned vainglory

Dans ce chapitre, les attaques les plus courantes contre Michel de Marillac apparaissent en filigrane, et Lezeau y répond en mettant l’accent sur l’humilité et la dévotion de son héros au cours des années où il tenait les sceaux du royaume.  Marillac y est dépeint comme un « ambassadeur de la grâce divine », tout en étant un bon serviteur du roi. Dans une première partie, des épisodes de la vie de Marillac témoignent de la reconnaissance, par son entourage, de son humilité et de la justice avec laquelle il exerce sa charge. Ainsi, les conseillers du roi, les échevins et les maires des villes (avec l'exemple de la réception de Marillac à Valence en 1609), le roi lui-même et les religieuses de Lizieux admettent que le garde des sceaux effectue sa charge avec justice et impartialité, refusant les honneurs et les abus en matière de privilèges. Dans une seconde partie, l'auteur insiste sur la majesté naturelle de Marillac et sur son refus des mondanités qui expliquerait en grande partie le contenu du « code Michau ». Là encore, Lezeau reprend les critiques les plus communément faites à l'encontre de son héros, et les transforme en qualités de dévotion (ses banquets fastes, son hostilité à l'égard de la cour).

8. Comme il ne prenait point de consolation aux choses de la terre // That he found no consolation in earthly things

Le caractère ascétique de la vie de Michel de Marillac quand il fut garde des sceaux est mis en exergue dans ce chapitre. Une fois encore, la stratégie discursive de Lezeau consiste en un retournement de perspective quant à la disgrâce du garde des sceaux. En effet, l'auteur ne cesse de convertir l'échec temporel de son héros en un triomphe spirituel. Ainsi, il insiste sur le rejet que Marillac manifestait à l'égard des choses matérielles et de l'enrichissement. Les sceaux constituant la charge la plus haute du royaume, les honneurs et les privilèges qui en découlent sont nécessairement très nombreux. Lezeau les dépeint comme de véritables tentations auxquelles le garde des sceaux a su résister. Paradoxalement, les années où Marillac fut garde des sceaux ont également été celles où sa vie fut la plus ascétique.  Le rejet des choses matérielles laisse peu à peu place, dans le chapitre, à l'intense correspondance que Marillac entretenait avec les religieuses carmélites, notamment avec sa belle-fille, et à la rédaction qu'il fit du traité de l'institution de l'ordre des Carmélites en France.

9. De sa dépendance et confiance en Dieu // Of his dependence and Confidence in God

 

10. De sa pieté et Devotion // Of his piety and devoutness

De nombreux extraits du Traité de la vie spirituelle sont convoqués dans la première partie du chapitre pour présenter la dévotion de Michel de Marillac comme une vocation spirituelle née dès son plus jeune âge, notamment lorsqu’il était, tout comme son rival Richelieu, au collège de Navarre. Puis Lezeau laisse place aux aspects quotidiens de la vie dévote de son héros, en insistant sur le retrait spirituel de Marillac alors même qu’il exerçait des charges publiques. A la manière des procès en canonisation, le chapitre contient des anecdotes rendant compte des nombreux actes de dévotion de Marillac. Enfin, le chapitre s’achève sur un registre plus institutionnel, et Lezeau y établit un parallèle entre l’implication de Marillac dans les institutions religieuses du royaume et sa distance à l’égard de la vie courtisane. Agent actif de la réforme post-tridentine en France, Michel de Marillac contribua tant à la création de nouveaux ordres religieux (comme les Oratoriens) et à la réforme d’autres ordres catholiques (le Carmel depuis Ste Thérèse, entre autres), comme il multiplia les donations à différents monastères. Les aspects quotidiens de la dévotion de Marillac se manifestent ainsi par plusieurs actes de contemplation, de modestie et de charité.
D. D L

11. De la Protection qu’il a donné Aux Religieuses Carmelines, Contre les Peres Carmes deschausses, De la reduction de la ville de la Rochelle, et de la nomination du R. Pere Michel Capucin son fils à l’Evesché de St Malo // Of the submission of the city of La Rochelle

Sans entrer dans le détail des événements du siège de La Rochelle, le chapitre développe, lettres à l'appui, l'interprétation que Marillac donne de cette victoire sur les protestants. Elle est le signe qu'il faut toujours placer sa confiance en Dieu, même quand une cause semble sans espoir. Témoin direct et présent, Marillac va jusqu’à décrire la ferveur catholique dans la ville « libérée » des protestants et remercie le ciel par d'ostensibles actions de grâce. Le siège de La Rochelle a une importance particulière pour les dévots puisqu’il valide leur approche politique : se fondre dans le service zélé de la monarchie plutôt que l’affronter pour faire triompher ses vues, en l’occurrence l’extirpation de l’hérésie.

12. De ses mortifications // Of his mortifications, illnesses and afflictions

Contrairement à ce qu’indique le titre du chapitre, il est moins question de dresser ici une liste des flagellations que s’incombait Marillac, que de montrer, dans la lignée de l’hagiographie carmélitaine du XVIIe siècle, en quoi les honneurs et les offices du garde des sceaux déchu sont en réalité le signe d’une recherche de l’humiliation volontaire de Michel de Marillac.
Dans la première moitié du chapitre, Lezeau insiste en effet sur les différentes maladies qui ont touché son héros de 1624 à 1631, lorsqu’il fut surintendant des finances et garde des sceaux. Au-delà de la construction textuelle d’une martyrologie – qui dépeint Marillac comme un modèle sanctifié de chasteté et de pureté comparable à l’érémitisme de St Alexis-, le chapitre contient de nombreuses informations sur l’entourage médical du héros ainsi que sur les remèdes appliqués à ses différentes maladies. La seconde partie du chapitre inscrit cette martyrologie dans l’idéologie politique des dévots. Ainsi, l’hagiographe explique la position de Michel de Marillac face à la mort de son fils René au siège de Montauban, celle de son ami Bérulle, protecteur des Carmélites en France et également vaincu par les Politiques, et de l’exécution de son frère Louis à l’issue de la journée des Dupes.
Autant d’épisodes utilisés par Lezeau pour montrer le caractère ascétique de la vie religieuse et politique de Michel de Marillac.

13. De sa Capacité d’Esprit // Of his intellectual abilities

Dans ce chapitre, Marillac apparaît comme l’archétype du serviteur zélé de la monarchie absolue. Ne ménageant pas sa peine pour servir le roi, il est présenté comme un travailleur obstiné et un spécialiste de l’État qu’il place au rang d’impératif catégorique que seul le service de l’Église peut venir surpasser. Doué en tout ce qu’il entreprend, le garde des Sceaux fait preuve, sans jamais défaillir, d’une culture universelle et d’une omniscience qui fait de lui un modèle de l’humanisme chrétien. Austère robin qui ne connaît que la dévotion pour l’État et pour l’Église, Marillac incarne le contre-modèle du favori et du courtisan. Détaché de la quête des vanités et des honneurs, il sait se préserver des mauvais conseillers et des factions de cour pour n’entendre que la voix de la raison et se consacrer tout entier au service du Très Chrétien, lieutenant de Dieu sur terre.
A-V S

14. Comment Il exerceoit la Justice // How he administrated Justice

Lezeau commence par énumérer les magistratures exercées par Marillac. En chacune d’elles, il eut une conduite désintéressée, sans considération du rang des personnes sur lesquelles la justice devait s’exercer. Marillac n’a pas recherché ces charges, qui pas n’ont refroidi sa piété et ne l’ont pas rendu vaniteux. Il refusa de s’enrichir ou de favoriser ses proches grâce à ces charges, imposant la même rigueur à ses subordonnés. Son honnêteté lui attira d’ailleurs de nombreuses inimitiés. Doté d’une importante force de travail, Marillac fit preuve d’une grande rigueur dans son organisation et sa gestion. Le chancelier combattit les fraudes, limita les dépenses excessives de l’Etat, défendit l’autorité des parlements, ainsi que les droits du roi sur son domaine contre les tentatives d’usurpation. Il combattit également la diffusion des libelles diffamatoires. Conciliant sa mission judiciaire avec le service de Dieu, il défendit avec la même ardeur les droits du roi et ceux de l’Eglise. Le chapitre se termine sur la reproduction d’une lettre à Bérulle, dans laquelle Marillac dresse le bilan de sa charge

15 L’ordonnance du Roy de 1629 // Of the Royal Ordonnance of 1629

Lezeau répond aux attaques contre l'ordonnance de 1629, dite « code michau », dont Marillac avait été le principal promoteur. Il entend démontrer que, contrairement à ce que dirent les ennemis de Marillac, le garde des sceaux n'élabora pas le texte de manière personnelle et autoritaire, mais dans un dialogue constant avec le conseil du roi, les parlements et Richelieu. L’auteur aborde ensuite certains aspects de l’ordonnance (juridiction des maîtres des requêtes, dérogation aux privilèges), pour montrer que les critiques qui les ont visés ne sont pas justifiées.  

16 Considération sur quelque changement en la manière de gouverner cest Etat depuis le temps de la Ligue // About a few changes in the way to administrate this State since the Ligue

Lezeau revient sur les années qui ont suivi la période de la Ligue. Il condamne la dureté de la répression menée par les parlementaires royalistes contre les bons catholiques, répression qui a porté préjudice à la religion. De plus, leur gallicanisme les a conduit à tenir pour nulle l’autorité pontificale, commettant ainsi une faute spirituelle. Or, de ce gallicanisme est également ressorti un renforcement inouï du pouvoir royal, ce qui paradoxalement a rabaissé l’autorité des parlements. Ces derniers, qui étaient tels des Etats généraux assemblés en permanence, ne peuvent plus jouer leur rôle de bornes à la puissance monarchique.

17. De ses Amys // Of his friends

Lezeau rapporte qu’accédant au Conseil du roi, Marillac prit soin de ne pas cultiver d’amitiés qui auraient pu, à force de sollicitations particulières, le détourner d’un exercice rigoureux et juste de sa charge. Il cherchait cependant à avoir des amis « selon Dieu », c’est-à-dire des amis dont la conversation pouvait concourir à son salut : Madame Acarie devenue sœur Marie de l’Incarnation, le cardinal de Bérulle, deux prieures de carmels parisiens en réputation de sainteté, Madame de Marillac sa belle-fille, et Lezeau lui-même. Marillac fut ami avec tous les grands serviteurs de Dieu de son temps. Il ne se servit jamais de ses hautes charges pour les favoriser, et ne recherchait jamais l’amitié en fonction de la puissance des individus. Dans ses conversations avec ses amis il ne cherchait ni consolation ni paroles mondaines, car ces dernières dégradent l’âme. Lezeau termine sur quelques conseils pour entretenir des amitiés aussi élevées que le faisait Marillac, amitiés qui se différencient en tous points de celles que l’on voit à la cour.
F M

18. Du peu d’attachement qu’il avoit a la Charge de Garde des Sceaux de France, et du désir qu’il avoit de la quitter // Of the feeble attachment that he has for the charge of Keeper of the Seals of France and of his desire to resign

Le chapitre décrit le détachement de Marillac vis-à-vis du pouvoir et des honneurs. Plus que cela, Lezeau relate à quel point Marillac les considère comme un fardeau et autant de pièges tendus, tant la faveur est inconstante et les luttes de pouvoir féroces. Pour autant, le chapitre raconte aussi l’obéissance totale de Marillac à son roi qui remplit les tâches qui lui sont confiées, avec compétence et qualité. De ce portrait de Marillac en charge ressortent deux traits saillants : la distance et la vertu du garde des Sceaux, ainsi que le poids écrasant de la charge au point qu’il demande lui-même, avec insistance, à la quitter. Le chapitre montre ainsi Marillac à contre-courant de la course aux honneurs, préparant ainsi la suite du récit : la journée des Dupes et la disgrâce qui, finalement (et rétrospectivement) exauceraient presque les vœux du garde des Sceaux et de son entourage. Du moins telle que la vie de Marillac est réécrite.

19. Comment il rendist les sceaux Et ce qui se passa jusqu’à ce qu’il fust conduict à Chasteaudun // How he turned over the Seals, [how] he wasput into the hands of guards, and what happened on his journey though Normandy until he arrived at Châteaudun

Le chapitre a pour origine le Journée des Dupes, le 10 novembre 1630. Il s’ouvre sur la rupture de Richelieu avec la Reine et son départ pour Le Havre, avant de revenir sur sa décision, d’aller trouver le roi et d’obtenir le départ de Michel de Marillac. La construction du récit présente un jeu quasi scénique : l’un part, l’autre reste, l’un revient, l’autre s’en va, le cardinal intrigue et s’accroche au pouvoir ; le garde des sceaux obéit au roi et démontre le peu d’attachement qu’il a pour le pouvoir. Marillac n’est pas seulement évincé, il est contraint à l’exil, un exil douloureux dans lequel il est traité comme un dangereux prisonnier gardé en permanence par un exempt et huit archers. Son exil le mène de Glatigny à Evreux, Caen et Lisieux, pour aboutir à Châteaudun. Dehors, les affaires du monde ont repris, Marillac, lui, professe son détachement et son soulagement, autant que son incompréhension face à la démesure du traitement infligé.

20. Extraict d’un memoire escript de sa main par lequel il appert de sa bonne disposition interieure du reglement de sa vie et quelque consideration sur ce changement si subit // Extract of the memoir written in his hand, by which his pure inner disposition and the adjustment of his life became apparent, and some considerations on this sudden change

Dans ce mémoire qu’il écrivit après s’être vu retirer les sceaux, Marillac tente de fixer l’interprétation qui peut être faite de l’événement ayant conduit à sa chute. L’enjeu est important et rappelé dès le début du mémoire. L’échec politique est ainsi converti en triomphe spirituel par le jeu de l’écriture. Le mémoire rappelle l’extrême soulagement de Marillac enfin déchargé de ce fardeau, soulagement bien supérieur aux « rudesses » qu’il doit endurer, gardé nuit et jour. La fin du chapitre fait place au commentaire de Lefèvre de Lezeau, estimant que, si pieuse la vie de Marillac fût-elle dans le service de l’Etat, rien ne peut être au-dessus de la vie contemplative. La grâce de Dieu aura finalement sauvé Marillac des périls de la cour, des affaires du monde et des charges dangereuses. L’attachement aux charges n’est que vanité. Lezeau achève le chapitre en précisant que tous les gens de biens ne doivent pas renoncer aux charges quand ils y sont appelés, mais qu’il faut être capable de les exercer sans s’y perdre.

21. De son sejour a Chasteaudun // Of his stay at Châteaudun

Le chapitre consacré à l'exil de Châteaudun relate la vie de Michel de Marillac qui est placé en résidence surveillée, d'abord chez un chanoine, puis ensuite, sous une surveillance plus étroite, au château de Châteaudun où il passe les derniers mois de sa vie. Cette ultime période voit l'ancien garde des sceaux subir une série d'humiliations présentées comme autant de jalons prouvant la saintteté du personnage. On lui demande de rendre les papiers d'Etat qu'il peut conserver, on surveille sa correspondance, on empêche sa famille et ses domestiques d'aller et venir, lorsqu'il formule la demande de changer de résidence on ne lui propose que le château de Vendôme, réputé inhabitable. L'Etat, et en filigrane Richelieu, par sa violence à l'égard de Marillac, apparaît sous un jour néfaste. La période est également jalonnée de deuils : condamnation à mort du Maréchal de Marillac à l'issue d'un procès présenté comme inique et mal mené, mort de l'épouse de ce dernier, maladie de la petite-fille de Marillac, qui est carmélite à Pontoise.
Dans ce contexte, Marillac est montré comme un saint (le mot est prononcé par son fils capucin, qui vient le visiter), qui trouve l'occasion de se mortifier et de faire son salut dans toute vexation, qui console ceux qui pleurent, qui multiplie les actes de charité (notamment pendant l'épisode pesteux à Châteaudun), et qui reste parfaitement détaché du monde tout en restant profondément sensible aux malheurs d'autrui. L'annonce de la mort du maréchal de Marillac est d'ailleurs l'une des rares fois où son visage s'anime dans le texte (on le voit devenir « fort rouge »).
La sainteté de Marillac (et de son demi-frère) est relatée par Lézeau dans plusieurs thèmes : sa constance dans les épreuves, la façon dont lui-même et sa famille sont miraculeusement épargnés par la peste, et la façon dont il réchappe de ce qui semble être une tentative d'assassinat lorsqu'un archer tire « par erreur » sur une fenêtre du château. La mort du Maréchal de Marillac est également présentée comme un martyre, qui viendrait couronner une vie passée à combattre les hérétiques (notamment à La Rochelle). Dans le même temps, Marillac se trouve au centre d'une intense activité de correspondance formant un triangle entre Châteaudun d'un côté, Paris et le Carmel de Pontoise de l'autre, où s'affairent ses parents et soutiens. Un réseau s'active (sans succès, nous le savons rétrospectivement), des liens se dessinent, occasion pour l'historien de retracer le réseau qui entoure l'ancien garde des Sceaux.
C R-L

22. De son Déced // Of his death

Ce chapitre raconte l’agonie de Marillac à Châteaudun, au début du mois d’août 1632. Lezeau, qui était présent, aux côtés de la belle-fille de Marillac, décrit en détail les affections et douleurs subies par son maître et la succession de médecins impuissants à son chevet. Mais il insiste surtout sur la sérénité de Marillac, sa volonté de continuer à communier malgré son état physique, et son désir que Dieu le retire du monde. Jusqu’au trépas, il conserva un jugement saint et la confiance en son créateur. Au moment de sa mort, une grande clarté fut aperçue par les carmélites de Pontoise et par d’autres personnes pieuses, signe évident pour Lezeau que l’âme de Marillac « s’en alla droict à Dieu ».  
F M

23. De sa sépulture et de son testament // Of his internment

Marillac meurt emprisonné à Châteaudun le 7 août 1632. L’organisation de ses funérailles et l’agencement de ses fondations pieuses testamentaires sont une dernière fois l’occasion pour lui de revêtir le costume du parfait pénitent. Les obsèques de Michel de Marillac venaient s’inscrire dans le modèle de la belle mort chrétienne et agissaient comme un prolongement dans la mort de ce qu’avait été sa piété de son vivant. Ainsi, l’appel aux Carmélites, aux Récollets et aux Oratoriens, - ordres particulièrement pénitents et spécialisés dans la prière pour les morts -, ancraient dans l’éternité le rôle qu’avait joué le chancelier dans le parti dévot et dans la réforme catholique, mais aussi dans la perpétuation du souvenir de la Ligue. Humbles et mystiques, les dernières volontés de Michel de Marillac incarnaient pourtant le paradigme de la mort aristocratique. Les sépultures séparées du corps et du cœur au plus proche des saints, le corps embaumé et le cercueil de plomb offerts au spectacle des habitants de Châteaudun, constituaient un langage cérémoniel replaçant le défunt Marillac au sommet de la hiérarchie sociale des mortels.

24. Des Graces speciales qu’il a receu de Dieu // Of the special graces that he received

Ce chapitre est une compilation de plusieurs documents écrits par Marillac, mais aussi par des carmélites de Pontoise et l’aumônier du garde des sceaux, Henri Holden. Parmi ces documents, le mémoire de l’aumônier de Marillac, M. Holden, le mémoire de Lisieux envoyé par Marillac à Madeleine de St Joseph en 1630 et des extraits de la correspondance épistolaire de Michel de Marillac avec des sœurs du couvent de Pontoise.
Deux caractéristiques de la sainteté carmélitaine y sont mises en évidence : d’une part le pouvoir miraculaire du saint, qui se manifeste par des dons divins (ou « grâces ») de prophétie. Le chapitre développe à ce propos longuement les prophéties qu’ont eues les religieuses de Pontoise et Michel de Marillac lui-même autour de l’exécution de son frère en 1632. D’autre part, Marillac est dépeint comme un modèle carmélitain de dévotion, préférant le recueillement intérieur et l’union amoureuse avec Dieu à une édification plus intellectualiste telle qu’elle existait chez les Jésuites.
Lezeau dresse une dichotomie entre la période qui s’étale de 1624 à 1631, et celle qui a suivi la disgrâce du garde des sceaux. A la vie spirituelle de Marillac, scandée par des visions encore floues du Christ, de la Vierge ou des anges, correspond sa vie temporelle et l’exercice de charges politiques. Les visions se multiplient et s’éclairent, dans cette logique, au moment de la disgrâce/retraite de Michel de Marillac jusqu’à sa mort à Châteaudun.

Pour citer ce document

, «Résumés des chapitres // Abstracts of the chapters», marillac [En ligne], Navigation / Navigate, mis à jour le : 05/02/2014
, URL : http://marillac.ehess.fr/index.php?2425.
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